De la pluie, par brutales ondées, noie le paysage. Puis se déchire le gris et le bleu est là. Toujours inattendu. Le corps en garde des hésitations. Sortir, se mettre à l’abri. Lire, aller marcher. Lever la tête, la baisser. Se presser, s’arrêter. Un moment au couvert sur le parvis d’une église. La rue déserte. L’averse se prolonge, s’intensifie, j’entre, fais le tour plusieurs fois, feuillette des documents poussiéreux laissés sur une table. Et, dessous, avise les dalles d’ardoise travaillées par le temps et les pas comme sous le ciseau d’un sculpteur. Y revenir avec feuille (du papier de cuisson, faute de mieux) et crayon pour en prendre l’empreinte. Toutes, les reporter sur le rouleau de papier. Avec leurs fissures, leurs reliefs, leurs accidents. Levant le nez j’aperçois deux écolières à queue de cheval, blotties sous un parapluie, qui m’observent. Se faire surprendre casquette sur la tête, à genoux, les mains caressant la pierre en une étrange prière.
Repenser alors à cette phrase d’Etel Adnan : « Année après année, nous ne faisons qu’amasser la poussière.»
